Fyre Festival : puissance et responsabilité des influenceurs
Difficile ces derniers jours d’échapper au dernier documentaire de Netflix sur le Fyre Festival intitulé « Fyre, the greatest party that never happened ». Sorti le 18 janvier, en même temps qu’un reportage similaire sur Hulu intitulé “Fyre Fraud”, il livre une enquête sans concession sur ce festival musical très select, promu par des centaines d’influenceurs, qui devait avoir lieu sur une île paradisiaque des Bahamas, mais qui n’a finalement jamais eu lieu. Une arnaque pour des milliers de personnes qui avaient payé leurs “packages VIP” à l’avance, parfois plusieurs centaines de milliers de dollars… menant son instigateur Billy McFarland en prison. Un film qui interroge aussi sur la puissance et la responsabilité des influenceurs qui ont participé activement à la promotion du Fyre Festival. Les influenceurs sont ils responsables des marques dont ils font la promotion ? S’ils ont eu leur rôle à jouer dans le succès fulgurant du Fyre Festival, ils ne sont en aucun cas responsables du fiasco et de l’arnaque, et ne doivent pas être condamnés.

Fyre, société fondée par Billy McFarland, avait pour vocation de mettre en contact célébrités et marques pour leurs événements privés, … un concurrent de Brand and Celebrities en somme 🙂 Pour se faire connaître du grand public, la startup a imaginé d’organiser un festival musical exceptionnel sur une île paradisiaque des Bahamas : le Fyre Festival !
Le succès planétaire de la campagne d’influence marketing du Fyre Festival repose autant sur le choix des influenceurs que sur le dispositif créatif : une illustration parfaite des meilleures pratiques.
L’histoire du Fyre Festival est avant tout une démonstration frappante de la puissance de l’influence marketing utilisée à bon escient. Pour promouvoir son festival, Billy McFarland et son associé Ja Rule ont fait le choix de miser avant tout sur ce le levier. Ils ont choisi les bons Key Opinion Leaders (K.O.L) qu’ils ont mis en scène dans un dispositif créatif à la fois inspirationnel et viral… un vrai succès.
Le spot publicitaire du Fyre Festival met en scène les top models internationaux parmi les plus suivis sur la planète (Bella Hadid, Emily Ratajkowski, Hailey Baldwin, Chanel Iman, Alessandra Ambrosio, Gizele Oliveira, Paulina Vega, Lais Ribeiro, Rose Bertram, Shanina Shaik, Hannah Ferguson, et Elsa Hosk qui rassemblent une communauté Instagram de plus de 150 millions de followers), mais également les plus engageants: leurs taux d’engagement varient entre 3% et 7%, soit 2 à 5 fois plus que la moyenne du taux d’engagement d’un influenceur de plus de 500 000 followers.
Le saviez vous ? Le taux d’engagement des influenceurs +500.000 followers est en moyenne de 1,3% sur Instagram en Q4 2018 (source : 1,2M de K.O.L sur www.kolsquare.com)
En plus de leur rôle de mannequin, toutes les participantes au clip ont relayé ce clip, ainsi que leur présence lors du tournage, sur leurs différents réseaux sociaux, notamment Instagram.
Au delà de leurs puissances de frappe globale, ces influenceuses sont parfaitement adaptées à la cible du Fyre Festival pour recruter des participants : pour chacunes d’entres elles, 20% de leurs communautés au moins sont localisées aux Etats-Unis qui reste le coeur de cible de Billy McFarland au lancement du Fyre Festival (données Kolsquare — communautés Instagram Q4 2018).
Captures d’écran du documentaire Netflix « Fyre : the greatest party that never happened » mis en ligne le 18 janvier dernier.
En complément des Top Models de référence, le Fyre Festival a engagé plus de 400 influenceurs à travers le monde pour relayer la vidéo promotionnelle : des stars comme Kendall Jenner (environ 80M de followers Instagram à l’époque, pour un investissement de 250,000$ selon Netflix — ce qui semble cohérent avec les tarifs marché — voir sur Kolsquare), en passant par des sportifs, musiciens et autres Key Opinion Leaders (K.O.L).
Le dispositif créatif de la campagne du Fyre Festival est également un cas d’école : une vidéo alléchante tournée à la perfection dans un coin de paradis des Bahamas qui met en scène des Top Models sur un yacht et des plages au sable blanc, et une armée d’influenceurs relayant un simple carré orange accompagné du hashtag #FyreFestival qui fera le tour de la planète en quelques heures.
Captures d’écran du documentaire Netflix « Fyre : the greatest party that never happened » mis en ligne le 18 janvier dernier.
Le lancement du Fyre Festival faisait preuve d’une véritable maîtrise de l’influence marketing et avait donc tout pour réussir aussi vite… deux jours après le lancement le festival était “sold-out”.
Oui mais voilà, le rêve vendu dans le spot publicitaire s’est transformé quelques mois plus tard en cauchemar pour les festivaliers car l’organisateur Billy McFarland n’a pas réussi à tenir ses engagements, et bien pire que cela, a trompé des centaines de personnes associées au projet, des ouvriers aux investisseurs en passant par les salariés de la société Fyre.
Billy McFarland a été poursuivi et condamné à une peine de 6 ans en prison fédérale, mais les milliers de personnes flouées dans ce fiasco ont également attaqué des influenceurs ayant participé à la promotion du Festival… une démarche dénuée de sens.
Les influenceurs ne peuvent pas être tenus responsables des produits ou services dont ils font la promotion, mais ils ont la responsabilité et le devoir de sélectionner avec attention leurs projets : ils ne sont donc aucunement responsables de l’arnaque du Fyre Festival.
Tels des super héros modernes, les influenceurs ont des superpouvoirs ! Le Key Opinion Leaders, à travers ses réseaux sociaux, est devenu un véritable media. Les medias sont puissants car ils ont la capacité d’influencer leur audience. Mais ces nouveaux medias, extrêmements fragmentés (il existe des millions de KOL dans le monde), sont encore plus puissants car ils sont extrêmement affinitaires.
L’épisode Fyre Festival nous montre que les influenceurs inspirent une confiance de plus en plus aveugle à leurs followers. Si la perte progressive de l’esprit critique de leur communauté rend cruciales l’authenticité et la transparence des influenceurs, doivent-ils pour autant être jugés coupables ? (pour plus d’informations lire notre article : L’influence marketing est une question de confiance)
Si le spot vidéo du Fyre Festival avait été diffusé sur une chaîne de télévision, viendrait-il à l’esprit des personnes flouées de poursuivre en justice la chaîne en question ? Bien sur que non, on ne poursuit pas un media pour la diffusion d’une campagne de publicité frauduleuse.
Karl Lagerfeld, mis en scène dans des spots TV pour la marque Volkswagen, a-t-il été poursuivi par l’Europe ou les consommateurs floués par le constructeur automobile lorsque le “dieselgate” a été révélé ? Bien sur que non, on ne poursuit pas une égérie pour sa participation à une campagne de publicité frauduleuse.
A travers ces deux exemples, on voit bien que la responsabilité des K.O.L ne saurait être raisonnablement engagée.
En revanche, pour le media comme pour l’égérie, être associé à cette campagne frauduleuse peut avoir un impact négatif très fort sur son image, l’engageant à choisir avec une grande attention ses partenaires.
Le Key Opinion Leader (K.O.L) a plus à perdre que n’importe quel autre parti en associant son image à une arnaque. Pour vivre de son influence sur les réseaux, l’influenceur doit pouvoir préserver le respect réciproque qu’il entretient avec sa communauté. En étant ostensiblement transparent et sincère envers ses followers il accroît sa légitimité à défendre un produit, et ainsi son attractivité pour les marques. A l’inverse si son image est entachée d’un scandale tel que celui du Fyre Festival, peu de temps suffit pour qu’il perde les faveurs des internautes et des marques.
Excuses publiques d’une influenceuse suite au Fyre Festival
“With Great Power comes Great Responsability” — Spiderman
Aussi malheureux soit-il, l’épisode Fyre Festival a le mérite de rappeler la puissance et la responsabilité des Key Opinion Leaders (K.O.L) dans les campagnes d’Influence Marketing. Les règles d’éthique s’appliquent tout autant à ce marché qu’ailleurs. Vendre du rêve, c’est prendre le risque de décevoir, et parfois tromper le consommateur si le rêve n’est pas du tout au rendez-vous… Si l’influence marketing fonctionne aussi bien depuis quelques années, c’est justement parce que les K.O.L sont devenus un véritable media affinitaire, et savent mieux que quiconque parler à leur communauté sur les réseaux sociaux. Il ne s’agit donc pas tant pour les pour eux de vendre du rêve, que de vendre du sens. Et chez Kolsquare, nous sommes là pour les accompagner.
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